Traduire le Fantôme
Sébastien Lespinasse
Traduire le Fantôme est le résultat d’une expérience d’écoute menée dans la durée : comment recueillir la parole des fantômes – obsessions, refrains idiots, bribes de discours – qui nous hantent, comment lui donner forme, la transcrire en phrases, elle qui n’est qu’un balbutiement du devenir, un quelque chose qui reste, refuse d’être englouti dans le brassage quotidien et incessant des pensées flottantes.
Refuser tout plan préétabli pour mieux se mettre à la portée de ce qui vient : accepter une rencontre, suivre le grain de ces voix presque sans paroles qui affluent, ménager ainsi des espaces entre les phrases.
Plutôt que de frayer un chemin, poser résolument, « en conscience », des phrases les unes à côté des autres afin que le paysage se révèle hors-champ.
J’ai nagé à côté d’un pharaon à la piscine municipale.
J’adore sa coiffe dorée.
Entre deux virgules, oups, l’événement.
Le plus souvent les gardiens de musée ignorent ce qu’ils gardent.
Le temps efface plus qu’il accumule.
Les bras des grues ont tendance à orienter mon regard.